mardi 8 août 2017

Ils avancent.



Pour voir, pour commencer, pour recommencer, pour entreprendre et finir et réussir et suivre sur le chemin une ombre bleue, un chien, une créature étrange. Il court sans le savoir, sans y penser, sans rien entendre, sans avancer et sans cacher aux autres la vérité et l’absurde et sombre réalité, ils courent sur le chemin, les oiseaux blancs volent ensemble.

La pluie a enfoncé la boue entre les pattes, les ongles rentrent et sortent, la terre grise et noire remonte, des escargots, des coquilles, et signe le pèlerinage, la confusion, le soin. Ils courent vers le haut, ils sautent vers le bon dieu et croisent dans les airs le fil de la vierge, la punition, la vendange, l’estocade, la saison prise au genou, serrée dans les cuisses, sous la fenêtre, appuyés contre le mur.

Il pleut et l’épaule enfoncée dans la paroi, ils courent l’un après l’autre, le chien griffe et mord le bâton, la boue entre les ongles, entre les dents, les oiseaux blancs volent ensemble, la lune meurt au matin, les oiseaux volent et se posent ensemble. Le chemin seul, la longue crainte, la jambe folle sous le poids, les charme de la ritournelle, la course dans le froid du jour et le jouir au partir tôt. La grande fermeture, la clé serre les jambes et plie le doigt et ronge l’âme et finit le seul œil qui ferme et penche sur le sol boueux, le pied y plonge et recommence. Les ongles griffent le sol et la boue serre la cheville, les jambes sont en émoi.

Le chien court aveuglément sur la route, il faut finir cette avancée, ce vague dans l’âme, cet échange, les oiseaux blancs passent si près et se frottent sur la lisière, le canal frotte l’eau au ciel, les hommes courent sur la berge les bateaux passent, la lumière avec l’air bleu est un plaisir et une blessure, un gratte pied sur l’herbe rase. Il file dans le matin et songe bleu et songe mal et rêve un malheur pour la tête, une errance pour la saison.

Un feuillage berce le songe et frémit, il n’y a pas de vallon, la terre est plate, plate, les ombres chevauchent, les herbes sèchent, les fleurs fanent, la sombre espérance se tord et tire l’angoisse par le pied et le petit doigt et courbe la tête et repense au poids des ans, aux vertus fades, aux chiens qui aboient sur la terre, la boue entre les ongles, la bave sur le nez.

Les yeux perdus dans la routine il tourne avant de tourner, il part sur la suite des ombres et gémit sans volonté et frémit sur l’eau, il tire le char de la nuit passée, les ombres bleues sont sur sa route, il y pense encore plus fort, il tord le nez et se venge et pèse son poids sur les os, il tire de la nuit perdue un reste de précision, une escapade, il court et force le chien à finir, à venir et prendre un bain de boue entre les pieds et salit le pavé et frotte, les traces de boue sur le visage, le poil séché et poudré, les éclats de nature noire, le vert  sous le pied, l’herbe écrasée, les narines bouchées de sang et fermées aux ciel tout bleu d’or et d’argent et plisse et déplisse la toile.

L’air est bleu, les animaux se calment, il tourne sur lui et saute et arrache un bâton droit, une évidence, les deux amusent le paysage, la droiture du chemin clair, la boue entre les doigts du pied, il est fou et marche dans l’eau et dans la boue et dans le vent et respire les odeurs fortes, l’herbe est verte et sous le poids répand aux autres les odeurs et glisse sous son pied tendu, il est fou et rempli ses yeux.

Ils avancent dans l’herbe verte, le chien en soulevant les yeux, ils se remplissent d’air sauvage et frémissent, le grand âge passe sur le chemin, il fait droit et bon et il frissonne, le ciel d’air bleu ploie sous la charge, il passe comme un roi chargé du poids de sa couronne.      

27 Février 2007.

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