jeudi 14 décembre 2017

Le jardin retourné

Le jardin retourné, la maison relavée, le dos s’effondre dans la courbature, l’eau coule sur la peau au pli du coude. Travailler à faire et défaire la lune, le torrent, les larmes et la vue, le fil des jours et les oracles, les saisons, la liberté et la fidélité. Entendre, les oiseaux se balancer dans l’arbre, la vie chanter. Le bateau avance vers son nid, cap à la brume, cet été la chaleur se porte comme une laine au soleil de janvier. La liberté se promène dans le soir, étouffée d’insectes, ils sont imprécis et en retard sur le programme du jour. L’amour s’entretient dans la chaleur constante du sérail. Les vents jalousent la sonorité des vases, urnes que l’on transporte vides. Le rêve fera éclore une forêt de bambous et pampres complices, amours nocturnes et tendres secrets voguent sur la rame d’une galère que perd son poids d’or et de plumes. La cérémonie accorde les deux qui prévoient sans limite une éternité sans honte et sans pudeur. Le temps viendra bien, cela est certitude, ou des enfants joueront sur ce coin du monde, sous le regard des planètes et des étoiles, de l’oubli et du commencement.

Remets à l’éternel ton souhait de vengeance sur la vie et le temps qui fuit sans se poser. Ils seront là dans ton âge d’aveugle, de boiteux, de perclus et d’os cassant. Ils te diront les choses évidentes du refus et de la répression du monde si vieux et de leurs jeunes forces et tu diras lisez les vieux, heureux le pays couronné de montagnes, l’enfance y fait au sommet le sacrifice de jeunes forces. Montagne ou plat pays au bord de la mer, larme de sel et crins de taureaux volent dans le vent, sur le poids du cheval en course vers la grâce, face au danger de la mer qui recule et ne revient plus. Ils sont déjà présents, ces enfants de la lune et du soleil, ils chantent en canon, ces croqueurs de noisettes, ils sifflent comme les oiseaux sous les fenêtres, ils songent en passant à la vie qui s’en va et aux anciens qui abandonnent. Le passage de la force vers la sagesse accompagne la beauté en nage sur cette charge de plaisir et d’abandon, de renoncement et d’acceptation, de rêve de jeunesse et de faiblesse qui pointe et qui à chaque rêve enferme le plus menu dans la ronde des peurs et des regrets.

Acceptons ce futur d’enfants et de rires. Le visage des remuants abrite une étincelle, un brandon pour luire dans les ténèbres, dans la clarté obscure de l’éveil, dans l’attente et l’espérance, confions nos forces aux autres ceux qui se lèvent après et plus tard, mais chaque jour aussi tôt. Les beaux enfants sous les fenêtres, chantent le cri des oiseaux qui se rappellent dans les branches. Un jour de calme et de sagesse, ils seront là, dans la chambre des saisons, ils verront se défaire ces hommes vieux qui auront cru tout donner. La fuite s’invente et la respiration inonde ces corps qui ne sont presque rien. La vengeance est une évidence, les enfants seront perdus dans le vieil homme qui aux lèvres et dans le cœur a la loi et les vieux textes, dans les yeux la passion brisée qui rend gorge sur l’autel des regrets et de la prière.

Ne rien faire et rien dire, rester posé sur ce coin du monde et voir venir du trouble et du carnage, des rames sur l’eau et des coureurs qui grimpent vers le bleu du ciel et les orages. Le vent de la fureur et l’émoi de la brise franchissent la cote vers ces grains de poussière, ce coin du monde où on apprend à courir, on apprend que le regard est circulaire et la terre ronde.

23 Juillet 2004.
































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